Comme un roman de Daniel Pennac

LES DROITS IMPRESCRIPTIBLES DU LECTEUR

1. Le droit de ne pas lire.
2. Le droit de sauter des pages.
3. Le droit de ne pas finir un livre.
4. Le droit de relire.
5. Le droit de lire n’importe quoi.
6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible)
7. Le droit de lire n’importe où.
8. Le droit de grappiller.
9. Le droit de lire à voix haute.
10. Le droit de nous taire.

couv49899036
16/20

Les livres qui « parlent » de littérature ou de lecture ont une grande valeur à mes yeux, et celui-ci, très connu de la sphère littéraire, n’a pas fait exception, bien qu’il ne soit pas non plus exceptionnel. L’enjeu de ce roman qui n’en est pas un, c’est de désacraliser la littérature, de montrer que la lecture est accessible à tou-te-s mais qu’elle n’est pas non plus nécessaire. Forcément, le style d’écriture se forme selon cette ambition, il n’est donc ni très complexe, ni des plus intéressants — et c’est ce que j’ai trouvé dommage. 

Pour quiconque se dirige vers l’enseignement, et plus particulièrement vers l’enseignement du français, de la lecture et / ou de la littérature, cet ouvrage permet de comprendre ce que représentent ces trois disciplines pour un-e élève lambda, qui arrive au collège ou au lycée sans avoir un intérêt marqué pour les livres. Se situant entre le récit et l’essai, le livre de Daniel Pennac m’a permis notamment de comprendre le désintérêt de certain-e-s face à la lecture. Je me suis rendue compte, entre autres, que si moi, j’arrivais en classe de 6ème avec un amour de la lecture déjà ancré en moi grâce, sans aucun doute, à ma maman — coucou maman!!! — et que je passais le plus clair de mon temps au CDI ou en étude à lire des livres jeunesse ; c’était loin d’être le cas de tout le monde. Et il me faut concéder que peut-être, si nos professeur-e-s de français ne nous avaient pas fait choisir nos lectures parmi un petit échantillon de livres, si l’on avait été forcé-e-s à lire LE livre choisi par le collège, alors peut-être j’aurais eu ce rejet décrit dans Comme un roman face à la lecture obligatoire qui devient corvée. 

« Peu d’objets éveillent, comme le livre, le sentiment d’absolue propriété. Tombés entre nos mains, les livres deviennent nos esclaves — esclaves, oui, car de matière vivante, mais esclaves que nul ne songerait à affranchir, car de feuilles mortes. Comme tels, ils subissent les pires traitements, fruits des plus folles amours ou d’affreuses fureurs. Et que je te corne les pages (oh ! quelle blessure, chaque fois, cette vision de la page cornée ! « mais c’est pour savoir où j’en suiiiiiiiis ! ») et que je te pose ma tasse de café sur la couverture, ces auréoles, ces reliefs de tartine, ces taches d’huile solaire… et que je te laisse un peu partout l’empreinte de mon pouce, celui qui bourre ma pipe pendant que je lis… et cette Pléiade séchant piteusement sur le radiateur après être tombée dans ton bain (« ton bain, ma chérie, mais mon Swift ! »)… et ces marges griffonnées de commentaires heureusement illisibles, ces paragraphes nimbés de marqueurs fluorescents… ce bouquin définitivement infirme pour être resté une semaine entière ouvert sur la tranche, cet autre prétendument protégé par une immonde couverture de plastique transparent à reflets pétroléens… ce lit disparaissant sous une banquise de livres éparpillés comme des oiseaux morts… cette pile de Folio abandonnés à la moisissure du grenier… ces malheureux livres d’enfance que plus personne ne lit, exilés dans une maison de campagne où plus personne ne va… et tous ces autres sur les quais, bradés aux revendeurs d’esclaves…
Tout, nous faisons tout subir aux livres. Mais c’est la façon dont les autres les malmènent qui seule nous chagrine… »

Je pense donc que, même si la virtuosité stylistique n’est selon moi pas au rendez-vous, la lecture de cet ouvrage est primordiale pour se familiariser à des relations avec la lecture qui soient différentes de la nôtre. De plus, comme dit plus haut, il donne aussi des solutions aux enseignant-e-s en devenir, en proposant par exemple de renouer le lien entre les élèves et les livres au moyen de la lecture à voix haute, qui reste notre première expérience de la lecture et permet d’envisager d’abord le livre comme une histoire, avant de chercher à le décortiquer (bien sûr, c’est juste pour le début, parce que décortiquer les livres ça reste TROP GÉNIAL!!! mais je m’éloigne du sujet). 

Pour finir, je vous renvoie vers cette récente vidéo de Lemon June, qui parle de ces relations plurielles et diverses à la lecture dès que cette dernière devient obligatoire :

bises, emi

EnregistrerEnregistrerEnregistrerEnregistrer

8 commentaires sur “Comme un roman de Daniel Pennac

Laisser un commentaire